Les Dauphins bleus et blancs qui peuplent les eaux littorales azuréennes sont fortement impactés par les activités humaines notamment en raison d’une activité touristique importante en période estivale.

Les naissances de Dauphin bleu et blanc ont lieu en été : période de très grande vulnérabilité et d’activités humaines intenses dans les eaux côtières

Le trafic maritime

Le trafic maritime côtier azuréen a considérablement augmenté au cours des deux dernières décennies, surtout pour ce qui est des bateaux à moteur, les unités de plus de 12 m notamment. En été, le trafic de ces unités moyennes a au moins doublé, probablement triplé, et peut-être même quadruplé entre 2002 et 2019 ; on observe qu’il est important presque en toutes saisons ! Le bruit induit par le trafic maritime masque considérablement les communications entre les dauphins ce qui peut provoquer la séparation des mères et de leurs petits, avec des conséquences létales. La pollution chimique associée, dans l’air et dans l’eau, n’est pas non plus à négliger.

Grande plaisance sur la Côte d’Azur

La pollution sonore

Les cétacés dépendent du son pour s’orienter, trouver de la nourriture, localiser un congénère, éviter les prédateurs et communiquer.

Le niveau sonore sous-marin ne cesse d’augmenter en raison de l’intensification du trafic maritime, de l’utilisation de sonars par les militaires, ou de canons à air comprimé pour la prospection sismique… Ce vacarme est à l’origine de changements comportementaux et de distribution des cétacés. En zone azuréenne, on observe aussi un bruit sous-marin important généré par les installations côtières comme le traitement des eaux ou le pompage. La propagation de ce bruit peut s’étendre à plus de 20 kilomètres et nuit à la cohésion des groupes lors du nourrissage nocturne, avec un risque d’échouage dû à l’isolement près du rivage de jeunes animaux.

Infographie issue d’un document réalisé par l’IFAW, l’OFB et les Armateurs de France

Le whale-watching et l’observation par les plaisanciers

L’observation des cétacés dans leur milieu naturel peut être une source de perturbation pour les dauphins si elle est mal pratiquée, sans respecter le code de bonne conduite créé par le Sanctuaire Pelagos. D’autre part, depuis 2021 (arrêté ministériel du 3 septembre 2020 et arrêté préfectoral 6 juillet 2021), il est interdit d’approcher les cétacés à moins de 100 mètres dans toutes les eaux méditerranéennes françaises, et bien sûr de les déranger. Cela est important car une approche non-respectueuse pourra provoquer un changement d’activité des animaux (passage de la socialisation ou du repos vers l’évitement, par exemple), ce qui est à terme néfaste au dynamisme de la population.

La pollution marine, les maladies

Les dauphins sont victimes de la pollution par des métaux lourds et des composés organochlorés dont les PCB et le DDT. Les polluants sont concentrés dans les tissus des dauphins et peuvent avoir des effets sur la reproduction et les défenses immunitaires. Dans la zone azuréenne, on peut également se poser des questions sur les conséquences des rejets des stations de traitements des eaux usées sur le réseau trophique côtier.

La pollution de l’eau, les périodes de moindre abondance alimentaire, le stress, peuvent affaiblir les dauphins, favoriser les pathologies individuelles et le parasitisme, et potentiellement faciliter la résurgence d’épizooties telle que celle de morbillivirus qui cause des mortalités importantes.

Les dérivés du DTT (insecticides…), produits interdits depuis des décennies, sont encore présents dans le gras des cétacés, affectant leur capacité de résistance aux maladies ou leur fertilité.

La pêche professionnelle

Même si les filets maillants dérivants de plus de 2,5 km sont interdits en Europe depuis 2002, les dauphins qui peuplent le secteur azuréen sont impactés par la pêche professionnelle artisanale. Les nécropsies réalisées par les membres du Réseau National Echouages révèlent des indices de capture sur plus de 10 % des Dauphins bleus et blancs échoués entre 2017 et 2019, à l’échelle de la Méditerranée française. En ce qui concerne les Alpes-Maritimes, la proportion de dauphins présentant des traces de capture varie mais est souvent plus élevée (40% sur les années 2020 et 2021). C’est pendant la chasse nocturne que des dauphins se prennent régulièrement dans les filets des pêcheurs, et meurent.

Il est également possible que la pêche soit en concurrence avec les dauphins bleus et blancs pour certaines proies, mais cela reste à documenter.

Traces de capture accidentelle sur un Dauphin bleu et blanc

Ainsi, la multiplication des activités humaines dans la zone azuréenne a pour conséquences :

  • une variation nette de la distribution spatiale des dauphins qui quittent leur habitat côtier pour se rendre plus au large,
  • une baisse de l’effectif moyen des groupes observés en été (qui passe de 22 à 19 individus),
  • une baisse de la densité locale de population (qui passe de 0,72 individu par km2 en 2003-2006 à 0,32 individu par km2 en 2016-2018),
  • une augmentation de la vitesse de déplacement des dauphins (la moyenne passe de 3,4 nœuds à 4,1 nœuds),
  • une diminution de la fréquence de socialisation en été, en particulier en milieu de journée, plage horaire où elle était prépondérante en 1989-2022.

Des actions de protection doivent être mises en œuvre rapidement si l’on souhaite empêcher la disparition de cette population côtière de Dauphins bleus et blancs.